Les véhicules électriques pourraient agir comme des batteries pour les maisons et les réseaux électriques. Mais la technologie pour y parvenir est complexe. Avec la plupart des Véhicules électriques garés au travail ou à la maison toute la journée, vous vous demandez peut-être si vous économiserez autant d’argent que possible. Mais que se passerait-il si quelqu’un vous disait que vous possédez en fait de grosses batteries sur roues qui pourraient vous rapporter de l’argent ? L’énergie excédentaire contenue dans les véhicules électriques (VE) peut être revendue au réseau au lieu d’être stockée, et elle pourrait être utilisée pour alimenter des millions de ménages au moment où ils en ont le plus besoin, ce qui est particulièrement logique dans le contexte d’une crise énergétique mondiale. Avec des voitures et des camionnettes garées en moyenne 23 heures par jour, le potentiel est énorme. D’ici 2030, date à laquelle aucun nouveau véhicule à combustion ne sera autorisé à être vendu au Royaume-Uni, selon les estimations du cabinet de conseil en énergie Delta-EE, il y aura environ 14 millions de véhicules électriques sur les routes britanniques et 84 millions en Europe,. Cela fait beaucoup de batteries sur roues dans lesquelles puiser l'énergie. Tout ce dont les gens ont besoin, c’est, tout simplement, d’un chargeur qui fonctionne dans les deux sens. Ce type de technologie existe déjà : les chargeurs bidirectionnels permettent aux utilisateurs de stocker de l’électricité bon marché en dehors des heures de pointe ou produite de l’énergie solaire dans une batterie de véhicule, puis de l’exporter vers le réseau ou directement dans une maison pendant les heures où l’électricité coûte le plus cher. Cependant, il y a quelques obstacles à surmonter avant que la recharge bidirectionnelle puisse se généraliser et convaincre les utilisateurs de ses avantages. L’exploitation de l’électricité inutilisée des véhicules électriques n’est pas un concept nouveau, du moins hors de l’Europe. En mars 2011, la centrale nucléaire de Fukushima au Japon a été endommagée par un tremblement de terre et un tsunami, provoquant des pannes de courant généralisées. Les constructeurs automobiles Nissan et Mitsubishi ont envoyé des dizaines de voitures électriques dans les zones les plus touchées pour transporter les travailleurs humanitaires et les fournitures, maintenir les appareils et les téléphones chargés et fournir du chauffage. Ce fut le début d’une nouvelle technologie qui permet de partager l’électricité stockée dans les batteries avec les immeubles et les familles. Il existe essentiellement deux façons de canaliser l’électricité d’un véhicule électrique vers une famille et d’économiser de l’argent dans le processus. Grâce à la technologie Vehicle-to-Home (V2H), un véhicule stationnaire peut être utilisé de la même manière qu’une batterie domestique. L’énergie solaire produite pendant la journée peut être stockée dans le véhicule électrique et utilisée pour alimenter les appareils électroménagers lorsque le soleil s’est couché. « L’objectif est d’atteindre l’autosuffisance et d’économiser de l’électricité sur le réseau », explique Markus Kramis, PDG d’EVTEC, une entreprise suisse qui construit des stations de recharge bidirectionnelles. Jusqu’à présent, l’entreprise a installé 110 systèmes de recharge bidirectionnelle à travers l’Europe. L’autre option consiste à revendre l’électricité à un réseau à un prix plus élevé que lorsqu’elle a été achetée en dehors des heures de pointe. Ce concept s’appelle le vehicle-to-grid (V2G). Une analyse réalisée en 2018 par OVO Energy et l’Imperial College London a suggéré que le V2G avait le potentiel d’économiser 3,5 milliards de livres sterling ( 6,05 milliards $ CAN) par an au système énergétique britannique. Plusieurs sociétés d’énergie veulent comprendre comment la recharge bidirectionnelle pourrait fonctionner commercialement. Il existe une centaine de projets de V2G dans le monde, dont la plupart se déroulent en Europe en collaboration avec des fournisseurs de réseau et des fabricants de véhicules électriques et de chargeurs. « Le réseau électrique fluctue, en particulier au Royaume-Uni, car il n’est pas connecté au continent. C’est pourquoi il y a plus d’intérêt et de financement de la part du gouvernement pour pousser les essais et acquérir de l’expérience avec des systèmes qui peuvent soutenir le réseau », explique Kramis. En 2020, EVTEC a installé cinq stations de recharge à l’extérieur de l’hôtel de ville d’Islington à Londres, et la société lancera un autre projet avec le fournisseur suisse d’autopartage Mobility plus tard cette année en utilisant 50 voitures électriques Honda. Étant donné que les voitures sont réservées ou utilisées via un système de réservation, les développeurs de logiciels peuvent clairement définir et contrôler quand une station de recharge exploite le surplus d’électricité et quand elle ne l’utilise pas. Il a déjà été prouvé que les chargeurs bidirectionnels peuvent faire économiser de l’argent aux utilisateurs. Un consortium comprenant la société d’énergie OVO Energy et Nissan a mené un essai de trois ans et installé 330 chargeurs bidirectionnels dans les foyers britanniques. Ils ont constaté que les participants pouvaient économiser jusqu’à 725 £ ( 1 255 $ CAN) annuellement sur les factures d’électricité en laissant leur voiture branchée lorsqu’elle n’est pas utilisée et en alimentant le réseau pendant les heures de pointe du souper. Il s’agit d’économies supplémentaires facilitant le passage d’une voiture conventionnelle à une voiture électrique : il en coûte en moyenne un peu plus de 500 £ (865 $ CAN) par an pour recharger une voiture électrique, contre environ 1 435 £ (2480 $ CAN) par an pour l’essence ou le diesel. La recharge d’une voiture électrique à domicile est généralement moins chère que les bornes de recharge publiques, et sur les campus universitaires et sur les lieux de travail, elle est parfois même offerte gratuitement. Le plus gros point d’achoppement, cependant, reste les coûts d’installation élevés des chargeurs bidirectionnels, explique John Murray, responsable des véhicules électriques au cabinet de conseil en énergie Delta-EE, même si les prix ont chuté jusqu’à 50 % au cours des deux ou trois dernières années. « Il est difficile de fixer un prix exact pour un chargeur V2G, car il n’est pas nécessairement toujours disponible à l’achat. » Dans le cas de l’essai OVO Energy-Nissan, le chargeur V2G était 3 700 £ (6 400 $ CAN) plus cher qu’un chargeur intelligent unidirectionnel qui peut recharger automatiquement une voiture aux heures les moins chères et ainsi économiser de l’argent. Les coûts d’installation devraient tomber à 1 000 £,(1730 $ CAN) a déclaré le groupe responsables du projet, pour que la nouvelle technologie vaille la peine d’être investie. Mis à part les modèles de Nissan, Honda et Mitsubishi, il existe actuellement relativement peu de véhicules qui prennent en charge la charge bidirectionnelle. Le constructeur automobile américain Ford a lancé une camionnette capable de stocker 131 kWh d’énergie et d’alimenter complètement une maison pendant trois jours sur une seule charge. « La crise énergétique et les hausses de prix qui en découlent pourraient accélérer l’adoption du V2H, car les clients cherchent à optimiser l’autoconsommation d’énergie et à se protéger de la hausse des coûts de l’électricité », explique M. Murray. On s’attend à ce que les chargeurs bidirectionnels deviennent moins chers au cours des prochaines années, à mesure qu’ils deviendront plus courants et que l’infrastructure nécessaire sera développée. Cependant, les propriétaires de véhicules électriques devront toujours être convaincus que la charge et la décharge récurrentes ne dégraderont pas leurs batteries plus rapidement, explique Ying Xie, professeur de gestion de la chaîne d’approvisionnement à l’Université Anglia Ruskin. Xie étudie l’acceptation et la connaissance des systèmes V2G par les consommateurs et a appris des propriétaires de véhicules électriques que la dégradation des batteries est une préoccupation majeure pour eux. Leur inquiétude est justifiée et a fait l’objet d’un débat scientifique, mais certains chercheurs suggèrent que laisser les batteries complètement chargées peut également les user. Selon M. Xie, de nombreux propriétaires de véhicules électriques ne savent pas exactement comment fonctionnent les batteries. « Et ce manque de connaissance peut conduire évidemment à un engagement réduit. » Il est peu probable que la recharge bidirectionnelle et la perspective d’une baisse des factures d’électricité incitent les gens à acheter un véhicule électrique. Les conducteurs sont plus susceptibles d’en acheter un en raison des préoccupations environnementales, des coûts d’exploitation plus faibles à long terme et de la réglementation imminente. Lorsque les véhicules à essence et diesel seront progressivement éliminés dans les années 2030, ils n’auront d’autre choix que de passer au tout électrique. « Mais promouvoir le V2G auprès des consommateurs, en particulier ceux qui en possèdent déjà un, est un moyen de maximiser l’utilisation de ces batteries. » Sabrina Weiss Wired Contribution: André H. Martel
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