Deux prodiges à la maîtrise en génie électrique de l’Université de Sherbrooke feront sous peu une percée dans le domaine de l’électrification des transports au Québec. Dès janvier prochain, Philippe Beauchamp et Rami Jarjour démarreront leurs activités pour exploiter leur technologie visant à fabriquer une batterie plus petite, plus puissante, plus durable et forcément, plus performante. C’est bien connu : la batterie électrique constitue l’organe-clé des voitures électriques, car elle influe sur ses performances et son autonomie. Emmagasiner le maximum d’énergie pour un encombrement minimal se veut de toute évidence le défi à relever pour tout type de véhicule écologique. Selon Philippe Beauchamp, la batterie intelligente qu’il a mise au point avec son collègue et ami se démarque par sa durabilité supérieure aux batteries actuellement utilisées dans les véhicules plus verts. Ils ont développé une batterie électrocinétique qui résoudra le problème de cyclage, soit l’action de charger et de décharger une batterie à répétition. Brevetée à l’échelle mondiale, cette technologie est destinée plus spécifiquement à des secteurs exigeants comme ceux des véhicules hybrides et électriques, des autobus, des véhicules d’urgence, des bennes à ordures et des camions de livraison. « Dans le cas d’une voiture électrique, pour avoir un véhicule beaucoup performant et qui a de l’autonomie, il faut deux caractéristiques dans la batterie : de la puissance et de l’énergie, avance M. Beauchamp. La puissance permet de faire de bonnes accélérations, alors que l’énergie permet de faire de nombreux kilomètres. D’une façon générale, une batterie n’a jamais ces caractéristiques réunies, à moins d’avoir de très grosses batteries qui se vendent cher sur le marché. » Gérer les yoyos de puissance Pour améliorer la durabilité des batteries tout en réduisant significativement leur coût de fabrication, les fondateurs d’IngeniArts ont décidé de prendre de bonnes cellules d’énergie pour les joindre à un organe de puissance, un volant d’inertie. Son principe permet de nos jours de stocker temporairement l’énergie sous forme de rotation mécanique. « Dans le cas du véhicule à essence traditionnel, il consommera plus d’essence pour les accélérations et va renvoyer l’énergie dans les disques de frein quand il s’agit d’un freinage, vulgarise Philippe Beauchamp. Dans la voiture électrique, nous essayons plutôt de récupérer cette énergie afin de la renvoyer dans les batteries et d’accroître, par le fait même, leur autonomie. Les batteries actuelles ont beaucoup de difficulté à gérer tous ces yoyos de puissance. » La technologie d’IngeniArt arrive ainsi pile-poil dans un contexte où le défi sociétal vise à réduire la consommation d’énergie dans le secteur des transports. Elle se place du coup à l’avant-garde de ce qui existe actuellement sur le marché, car elle permet une réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), en plus de faire économiser du carburant aux consommateurs. La Commission sur les enjeux énergétiques du Québec, dans un rapport dévoilé en février 2014, a révélé que les Québécois consomment, en moyenne, l’équivalent de près de 15 litres d’essence par jour et par personne en énergie. Cette donnée place le Québec parmi les plus gros consommateurs d’énergie au monde. »»»»»»»»»»»» Cliquer sur READ MORE pour la suite... »»»»»»»»»»»»»»»»»»»» Un éclair de génie Après avoir travaillé pendant quatre ans chez Alstom à titre d’ingénieur de conception électrique, les deux prodiges de l’Université de Sherbrooke avaient envie d’effectuer un retour à leur premier amour, le véhicule électrique. C’est précisément dans le cadre de leurs études de maîtrise qu’ils se sont rapidement intéressés à la batterie des véhicules, « parce que nous n’étions pas capables d’aller chercher la puissance que nous voulions ». « Nous avons alors commencé à creuser la problématique pour savoir précisément ce qui blesse dans la chaîne, ajoute le cofondateur d’IngeniArts. C’est à partir de ce moment que nous avons commencé à regarder de quelle façon se fabrique une batterie. Bien sûr, cela prend des systèmes très complexes. Nous n’avons donc pas vraiment inventé la solution. Nous avons plutôt trouvé une idée, qui s’est avérée géniale, et nous avons continué dans cette voie, qui nous a ensuite conduits au brevet. De fil en aiguille, nous avons alors décidé de lancer une entreprise pour exploiter cette technologie. » Rami Jarjour et Philippe Beauchamp entendent ainsi amorcer les activités de l’entreprise à compter du mois de janvier 2015 pour se positionner lentement, mais sûrement, dans le secteur industriel. Par contre, la commercialisation de leur technologie n’est pas pour demain, croit M. Beauchamp. « Ce qu’il faut savoir, c’est qu’il y a la technologie, le prototype de laboratoire ainsi que le produit commercial. C’est une escalade des niveaux d’intégration vers l’entreprise. Avec les ressources que nous allons chercher aujourd’hui, nous pouvons nous permettre de développer le vrai produit. Nous avons plusieurs partenaires québécois et canadiens intéressés à nous aider dans la conception, et même des clients prêts à intégrer le produit dans leur véhicule », précise-t-il. Des alliés de haut calibre Le succès de ces jeunes étudiants à la maîtrise ne tient pas du hasard. Leur aventure, qui saura en inspirer d’autres, a débuté dans les laboratoires du professeur Maxime Dubois, de la Faculté de génie de l’Université de Sherbrooke, dont l’un des domaines d’expertise et de recherche est l’optimisation des composants de motorisation et de stockage dans les véhicules électriques. « Nous entretenons d’étroites collaborations avec les centres de recherche universitaires, dont l’Université de Sherbrooke, bien sûr, dit Philippe Beauchamp. Nous essayons donc de nous entourer d’experts qui ont une réputation en la matière, parce que cela nécessite des connaissances approfondies des mécanismes se déroulant à l’intérieur des batteries et des véhicules électriques, qui nous permettront certainement de faire la différence. » Les deux prodiges sont également soutenus, depuis janvier 2014, par l’Accélérateur de création d’entreprises technologiques (ACET), situé à Sherbrooke. Lancé en mars 2011, l’ACET a pour mission de faciliter et d’accélérer la mise sur pied d’entreprises innovantes et créatrices d’emplois, pour transformer un projet en entreprise et aider le candidat à devenir un entrepreneur en vue de participer au développement d’une économie du savoir. « Rami Jarjour et Philippe Beauchamp font partie de la nouvelle génération de jeunes entrepreneurs talentueux qui ont su dès le départ s’entourer afin de donner un maximum de chances de réussite à leur entreprise », dit pour sa part Roger Noël, le président-directeur général de l’ACET. IngeniArts a déjà remporté deux prestigieux prix dans les derniers mois, dont un dans la catégorie Entrepreneuriat, affaires et vie économique, lors du gala Forces Avenir 2014 qui s’est tenu à Québec le 18 septembre dernier. En plus d’un trophée, ce prix a valu une bourse de 4000 $ aux récipiendaires. De plus, l’entreprise a aussi obtenu, en juin dernier, la bourse Pierre-Péladeau, d’une valeur de 50 000 $. Source: Alexandre Lampron, Le Devoir
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